Dans les bouches de Kotor au Monténégro

Après un solide petit-déjeuner, nous partons le cœur vaillant pour les bouches de Kotor à 2 heures de route de Dubrovnik, au Monténégro. Il s’agit d’un fjord où les montagnes abruptes (la plus haute mesure 1800m) plongent dans la mer. Après environ 30 mn de route à travers les villages croates le long de la côte, nous passons la frontière sans problème et entrons au Monténégro. Petit pays candidat à l’Europe depuis longtemps, le Monténégro n’en a pas encore atteint les standards. Paradoxalement, la monnaie officielle est l’euro, ce qui facilite les choses. Sinon, extérieurement, ça ressemble à la Croatie en un peu plus bétonné, un peu moins propre, et avec une écriture à base de caractères cyrilliques absolument incompréhensible. De plus, Free ne couvre pas le Monténégro, donc pas de GPS. Mais qu’importe, la direction de Kotor est indiquée pour les touristes.

Arrivées à l’entrée des bouches de Kotor, nous décidons d’en faire le tour pour admirer la vue qui est spectaculaire, bien que le temps soit un peu couvert. La végétation est luxuriante avec des acacias, des ifs et des grenadiers sauvages. Par endroits, des cyclamens sauvages colorent de rose vif les bas cotés et de grosses fleurs bleues poussent dans les anfractuosités des rochers. Nous nous dirigeons au fond des bouches, vers le village de Perast que nous atteignons vers midi. C’est un charmant village de pêcheurs qui s’étale au bord de l’eau. Enfin, il n’y a plus beaucoup de pêcheurs ou alors ils pêchent les touristes pour les emmener visiter une église, Notre-Dame-du-Récif, bâtie sur une île au milieu de la baie. Dédaignant la visite par trop encombrée de touristes, Marie-Paule sent pointer une petite faim. Nous nous arrêtons donc au bord de l’eau pour déguster quelques produits locaux arrosés d’un verre de prosseco.

Après cette entracte gastronomique, nous reprenons la route, toujours aussi spectaculaire, en direction de Kotor. A notre arrivée, le port est encombré par 3 énormes bateaux de croisière et les rues par les touristes. Impossible de s’arrêter. Nous roulons où nous pouvons au milieu des embouteillages, nous entrons dans un tunnel et à la sortie nous nous retrouvons au milieu de nulle part, sans savoir où nous sommes, sans GPS et sans carte. Heureusement, au niveau d’un rond point la direction du ferry qui traverse l’entrée des bouches est indiquée. Soulagées, nous prenons cette direction et nous trouvons le ferry. Je l’aurais bien repris en me passant de la visite de Kotor mais Marie-Paule n’est pas d’accord. Elle tient à sa visite et trouve une route improbable qui indique Kotor. Cette route au bord de l’eau est spectaculaire, elle retourne à Kotor en suivant la baie sur une dizaine de kilomètres. Elle est à peine assez large pour la Tesla et malheureusement beaucoup de voitures l’empruntent en sens inverse pour rejoindre le ferry. Il faut anticiper les voitures en sens inverse et se ranger dans le moindre espace pour les laisser passer. C’est un peu stressant.

Au bout d’une heure, nous retrouvons le centre ville de Kotor. Les touristes ont regagné leurs bateaux respectifs. Tout est calme. Nous trouvons même un parking à côté de l’entrée de la vieille ville. Finalement, Kotor est sympa à visiter. C’est un labyrinthe de ruelles étroites et de voûtes qui débouchent sur de petites places un peu austères ou sur des églises. Il y a bien sûr beaucoup de boutiques de souvenirs et encore quelques touristes, mais dans l’ensemble c’est agréable. Nous renonçons à escalader les remparts et encore une muraille qui ressemble à celle de Ston au profit d’un cappuccino et d’un gâteau monténégrin pour Marie-Paule. Le soir tombe doucement, il fait bon mais il est temps de rentrer.

Pour éviter le ferry, nous décidons de refaire le tour du fjord en sens inverse. La nuit tombe, les montagnes se découpent en ombres chinoises sur le ciel encore clair. Le crépuscule se reflète dans l’eau calme des bouches. La route s’élève dans la montagne et les villages qui s’illuminent ceinturent la baie d’une guirlande scintillante. Nous sommes tellement occupées à admirer le spectacle que nous manquons une bifurcation sans nous en apercevoir. Après avoir franchi plusieurs tunnels, nous nous retrouvons sur une route panoramique (dommage, il fait nuit noire) que nous ne nous souvenons pas avoir emprunté à l’aller mais, comme c’est une bonne route, Marie-Paule continue de rouler. Après encore une vingtaine de minutes il faut bien se rendre à l’évidence, nous sommes complètement perdues dans la montagne, dans le noir complet, sans avoir la moindre idée de la direction où nous allons, pas de GPS, pas de carte sauf sur 1 cm en bas de la carte de la Croatie. Je commence à paniquer. La batterie de la voiture est à 50%. Nous continuons de rouler dans le noir complet sur la route panoramique pendant un bon moment avant d’apercevoir les lumières de ce qui semble être un poste frontière. Laquelle ??? Croatie ? Bosnie-Herzégovine ? ou pire, Albanie ? En donnant les passeports, nous demandons au douanier où nous sommes et le chemin pour Dubrovnik. Il nous regarde d’un air condescendant et nous dit « avec une telle voiture, vous ne savez pas où vous êtes, sous-entendu vous êtes idiotes, il y a des chemins plus courts pour aller à Dubrovnik ». Merci, ça on savait. Nous repartons courageusement dans le noir et soudain, miraculeusement, le GPS se réveille. Toujours pas de carte, mais au moins il indique la direction. Après encore une heure de route en épingles à cheveux dans la montagne, nous atteignons enfin la ville de Trebinje (en Bosnie-Herzégovine), le retour de la civilisation. Enfin nous savons où nous sommes. Nous atteignons Dubrovnik une heure plus tard, épuisées. Quel retour…